Un de mes chevaux de bataille: la défense du jeu collectif plutôt que celui des jeux individuels qui nuisent aux équipes, aux individus et par dessus tout aux entreprises. Ce thème a été la conclusion de mon livre. Avec la conviction qu’on est plus intelligent à plusieurs.
Le management par le stress et la pression a montré ses limites. Il peut donner des résultats à court, voire moyen terme. Mais en épuisant les équipes, il casse leur énergie, leur potentiel créatif et appauvrit leur collaboration. Il diminue la qualité du service, de la prestation ou des produits des entreprises et pèse à terme sur leur compétitivité.Les conséquences, si elles ne se voient peut-être immédiatement, sont néfastes. Si l’image des entreprises se détériorent, les jeunes et souvent les plus brillants, préféreront partir à l’étranger ou créer leur propre structure.
L’arrivée des femmes à des postes de direction peut, en introduisant un élément nouveau peut faciliter les évolutions, comme probablement aussi l’entrée de nouvelles générations qui ont beaucoup plus voyagé que leurs aînés. Dans ce cas, les entreprises se trouvent confrontées à un autre challenge, faire collaborer harmonieusement les classes d’âge, continuer à motiver les seniors, tout en donnant des perspectives aux juniors. Elles ont besoin de tous pour construire le futur ; à elles de faire le lien entre elles pour que chacun trouve sa place. Leur tâche est souvent complexe car les différences de mentalité intergénérationnelle ne sont pas toujours évidentes à gérer. Elles nécessitent d’un dialogue entre les âges et éclaircir les attentes réciproques et d’offrir à chacun des perspectives de carrières.
Pour les seniors, un DRH note des différences notables de comportements : ceux qui sont toujours aussi dynamiques et curieux de beaucoup de choses, prêts aux changements et ceux, au contraire, devenus cyniques, « revenus de tout ». « Certains s’installent dans des postures de pouvoir, n’appuient pas les autres, se figent, adoptent des rapports très hiérarchisés. Ils se heurtent alors frontalement aux jeunes qui n’apprécient pas leurs manières de faire et ne manquent pas de le leur faire savoir », déplore-t-il. La tâche des entreprises est facilitée quand les seniors sont restés adaptables et plein d’énergie, elle l’est moins avec ceux qui se sont repliés sur eux-mêmes. Il faut alors trouver moyen de les faire évoluer, par le biais d’un coaching par exemple.
La « génération Y » (20 / 40 ans) demande, elle, une certaine adaptation en matière de gestion des ressources humaines. Les jeunes n’ont pas la même vision de la société que leurs aînés, ni la même relation à l’entreprise. Ils n’ont pas une très bonne image de l’entreprise : ils lui font moins confiance, ayant parfois vu leurs parents ou leur entourage s’investir, travailler beaucoup, subir une forte pression pour, au final, ne pas être reconnus, voire même licenciés malgré leurs efforts. Ils savent également que l’équation « effort = récompense » ne fonctionne pas toujours. S’ils sont prêts à s’investir, ils sont aussi plus soucieux que leurs aînés d’un bon équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Pour eux, il n’est plus question de faire carrière dans la même entreprise. Leur vie professionnelle est plus variée. Ils sont plus mobiles. Leur rapport à l’entreprise est plus distancié, et surtout plus contractuel. Il est plus difficile de les fidéliser, se plaignent aussi les recruteurs. Par contre, ils sont souvent davantage formés techniquement : ils ont un bon capital culturel, un meilleur niveau linguistique et ont souvent beaucoup plus voyagé. Ils sont demandeurs de responsabilités, s’expriment plus facilement. Ils sont aussi plus exigeants vis-à-vis de l’entreprise, veulent être formés, évoluer. Par contre, ils ne se sentent pas redevables, regardent beaucoup plus le marché de l’emploi et veulent être bien payés. Cette génération veut parfois tout et tout de suite. En ces temps de crise où les perspectives d’évolution sont limitées, les manager et les motiver devient compliqué, s’inquiètent plus d’un responsable. Pour autant, les entreprises ont besoin de repérer parmi eux leurs dirigeants de demain ; d’autant plus difficile que les plus brillants sont tentés de faire leur carrière à l’étranger.
Pour évoluer les entreprises pourraient aussi profiter de la présence d’étrangers en leur sein, comme vecteur de changement. Venus d’ailleurs, ils ont un regard distanciés sur nous qui nous aident à mieux nous connaître et nous différencier. En recueillant leurs témoignages sur nos comportements, nous découvrons nos atouts et nos dysfonctionnements. Ces derniers peuvent être un vrai obstacle à leur intégration. Ils ne sont d’ailleurs pas forcément les seuls à en souffrir quand il s’agit, par exemple, d’un manque de dialogue ou de transparence. Établir un dialogue avec eux pour mieux se comprendre, se respecter, s’apprécier mutuellement, adapter nos comportements pour avoir un minimum de valeurs partagées enrichit notre vision. C’est aussi une nécessité pour collaborer efficacement.
Les dirigeants et les RH doivent être vigilants aux différences culturelles quelles qu’elles soient. Quand il s’agit de cultures lointaines comme la culture chinoise, japonaise ou indienne, elles sont évidentes et sont, de fait souvent, attendues. C’est moins le cas quand il s’agit d’échanges entre Européens qui ont une culture plus proche de la nôtre. Pourtant, elles ne sont pas sans conséquence. En prendre conscience permet d’éviter des frottements inutiles ou des méprises.
Par ailleurs, nous évoluons dans un monde de plus en plus matérialiste qui fait de l’argent une valeur, à l’instar des Chinois ou des Américains pour qui, « to make money » est le summum de la réussite. Sans tomber dans leurs travers ou leurs excès, sans être obnubilés par la réussite financière, nous gagnerions à considérer davantage l’argent comme la récompense méritée d’un effort. Il ne s’agit pas de s’inscrire dans une course aux profits faite au détriment des hommes (comme dans les stratégies purement financières de certaines entreprises), mais de rechercher des profits basés sur une vraie expertise, la qualité, le dépassement qui rendent les hommes fiers de leur travail, donne du sens, conduisent à la réussite, comme dans le cas.
Les challenges à relever ne sont pas évidents mais ils nous donnent l’opportunité de réfléchir à nos richesses et de les mettre en valeur. Ils devraient contribuer à remettre du sens dans notre travail en retrouvant dynamisme et espoir en l’avenir. Nous ne partons pas les mains vides. Outre nos compétences techniques et organisationnelles, nous avons déjà bien d‘autres avantages concurrentiels tel que la qualité de notre enseignement, notre culture littéraire et scientifique, notre flexibilité et système D, notre finesse et notre sens des nuances, art de vivre, notre sens critique et esthétique, etc.
Investir dans l’humain est un bon moyen de les faire fructifier, de faire éclore les potentiels et les spécificités de chacun, de favoriser la réflexion et l’innovation pour que, jeunes et seniors, hommes et femmes, Français et étrangers aient une place dans la construction de la société de demain ; que les générations, sexes, nationalités s’entraident plutôt que s’affrontent. Cet état d’esprit donne du sens à une action commune. Or la quête de sens est importante pour tous, et même primordiale pour beaucoup de jeunes. En y travaillant ensemble, nous pouvons ainsi prendre individuellement et collectivement notre destin en main, mettre en commun nos énergies et nos talents pour nous remettre sur le chemin d’une réussite durable, qui fasse sens pour tous, nous ouvre sur le monde et assure notre avenir dans l’échiquier mondial.
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