Cet article paru en octobre 2003 dans » Le quotidien du médecin » reste complètement d’actualité
Qu’est-ce que le stress ?
Le mot » STRESS « , a été inventé par le Professeur Hans SELYE, célèbre physiologiste canadien. Il peut conduire à une perte de contrôle de soi, de ses capacités ou de son action sur l’environnement
Le Professeur SELYE définit le stress comme le » Syndrôme Général d’Adaption, c’est-à-dire que c’est la réponse physiologique de l’organisme, face à une situation non programmée « . Le stress est une réponse, à l’intérieur de l’individu, au niveau nerveux et au niveau physiologique qui est souvent initialisée par une situation extérieure ou intérieure qu’une personne doit vivre et qu’elle a du mal à contrôler.
Il existe différents domaines où il peut y avoir du stress. L’on considère qu’il y a un stress positif à partir du moment où il amène à l’action, et un stress négatif à partir du moment où celui-ci amène à une inhibition de l’action. Et c’est cette inhibition de l’action qui pose une difficulté pour celui qui la vit.
L’on peut constater différents symptômes, de la légère tension quand il est encore gérable à des tensions physiologiques, musculaires plus exacerbées. Cela peut être aussi un désordre dans la pensée, dans l’organisation des idées. Physiquement cela peut aller jusqu’à des tremblements, des douleurs abdominales, des complications de respiration, des vomissements et jusqu’à l’évanouissement pour sortir de la situation de stress.
Dans la réalité physiologique, ces manifestations du stress peuvent atteindre des degrés divers selon les situations. Mentalement, cela peut provoquer des troubles d’organisation de la pensée, d’organisation des objectifs, jusqu’à même ne plus savoir ce qu’on veut faire, jusqu’à ne plus pouvoir accéder à des savoirs, à des connaissances ou à des savoir-faire.
Donc, le stress est un générateur de troubles de la conscience de soi, mentaux ou physiologiques. Il est donc un indicateur important chez une personne lui signalant qu’elle doit chercher ce qu’elle a à faire, à comprendre, à gérer vis-à-vis d’elle-même pour retrouver un état d’équilibre. Le stress est essentiellement un système d’informations vis-à-vis de l’équilibre de la personne.
Il existe des domaines où le stress est volontaire puisque qu’il est décidé et qu’il fait partie inhérente de l’entrée en action pour les sportifs par exemple et pour les chanteurs, les comédiens avant d’entrer en scène. C’est un cadre qu’ils ont décidé, qu’ils ont choisi, qu’ils ont voulu et dont ils maîtrisent la plupart des paramètres. Il y a stress avant l’action parce connaissance et cela peut être générateur de stress.
Ce qui peut également être générateur de stress peut être lié à un savoir-faire. Quand quelqu’un apprend à conduire par exemple. Il va devoir contrôler un savoir-faire et comme il n’en a pas encore la totale maîtrise quand il se trouve en situation, cela peut être générateur de stress. Il a d’une part son système d’évaluation personnel, et il y a d’autre part un système d’évaluation à l’extérieur de lui qu’il ne contrôle pas non plus.
Ne pas avoir une totale maîtrise de l’environnement dans lequel une personne se trouve est un sujet de stress important. Depuis quelques années, avec la rapidité des déplacements professionnels, les changements de structures professionnelles, les personnes n’ont pas le temps de concevoir mentalement ces nouveaux changements, de s’y adapter mentalement. C’est l’environnement qui est le sujet de leurs changements, de leurs déplacements et du fait de ne pouvoir avoir de contrôle sur ces changements est générateur de stress.
Les conséquences, indicateurs et gestion du stress
La conséquence immédiate est un état d’inconfort, un état de mal être. Mais cela peut aussi, à long terme, altérer la conscience de la personne, altérer sa confiance en elle-même si, dans certaines situations, elle n’a pas réussi à gérer cette différence qu’il y a entre son intentionnalité et l’action. Si cela arrive une fois, elle peut se réajuster. Si cela arrive deux ou trois fois, elle va mettre en doute ses capacités de pouvoir faire les choses. A un certain moment, elle peut aller jusqu’à créer une présupposition sur le futur de son incapacité à pouvoir faire. Ce qui aura bien sur tendance à augmenter encore plus le stress.
Les cadres sont stressés et cela n’est pas bon pour leur santé. On le savait, encore fallait-il le mesurer. La CFE-CGC lance un Baromètre stress dont les premiers résultats mettent en évidence les méfaits d’une trop lourde charge de travail et d’un rythme qui s’est accéléré ces dernières années.
Le stress au travail et ses ravages qu’elle estime grandissants sont une préoccupation pour la Fédération française de l’encadrement CFE-CGC. C’est pourquoi, outre dénoncer la disparition des protections mises en place depuis la guerre ( » le Quotidien « du 14 avril 2003), elle a décidé de créer un observatoire permettant d’analyser les facteurs de stress et ses effets sur la santé des cadres.
Le Baromètre stress a réalisé en septembre (2003) ses premières mesures.
Ce qui stresse les cadres
Un échantillon représentatif de 539 cadres français a été interrogé en ligne, du 19 au 25, grâce à l’outil CAWI (Computer Assisted Web Interview) développé par OpinionWay.
Les cadres ne sont pas stressés par l’ambiance de travail, qu’ils jugent plutôt bonne (56 %), voire très bonne (19%), ni par une mauvaise définition de leurs responsabilités, puisque 63 % les jugent bien définies. Mais parce qu’ils ont une lourde charge de travail (73 % plutôt lourde, 17 % très lourde) et n’ont pas assez de temps (56 %) pour accomplir ce travail. Les trois quarts (73 %) estiment d’ailleurs que leur charge de travail s’est alourdie ces dernières années – contre 8 % qui la jugent moins importante – et plus nombreux encore (79 %) sont ceux qui ont le sentiment de devoir travailler plus vite.
D’autres facteurs peuvent concourir, dans une moindre mesure, au stress : sentiment d’être mal informé sur la stratégie de l’entreprise (48 %), laquelle apparaît mauvaise à 47 % des cadres interrogés, impression que les efforts ne sont pas reconnus à leur juste valeur (48 %) et encore moins récompensés à leur juste valeur (62 %), perspectives d’avenir personnel jugées mauvaises (53 %).
Plus concrètement, les cadres se plaignent d’être souvent interrompus (43 % et 37 % de temps en temps), d’être confrontés à des clients agressifs (9 % souvent, 35 % de temps en temps) ou encore de se sentir en situation de concurrence avec leur collèges (8 et 32 %). Et ils sont encore 31 % à se juger exposés à un risque de perte financière et 30 % à estimer avoir à exécuter des actions ne correspondant pas à leur éthique (7 % souvent, 23% de temps en temps).
Comment le stress se manifeste-t-il ?
Principalement par des tensions et crispations (29 % souvent et 50 % de temps en temps), des inquiétudes sur les conditions générales de la situation professionnelle (20 et 44 %), des difficultés à concilier travail et vie privée (19 et 39 %) et un sentiment de découragement (12 et 41 %). Mais cela peut se traduire aussi par des symptômes physiques : mal au dos (18 % souvent, 32 % de temps en temps), maux de tête et migraines (7 et 27 %) ou encore troubles visuels ou cutanés (8 et 24 %). Ils sont même 41 % à penser souvent (10 %) ou de temps en temps à quitter leur travail à cause du stress et 28 % à envisager un départ en retraite anticipé.
Le stress au travail incite aussi à fumer (11 % souvent, 10 % de temps en temps) ou à boire (1 et 6 %). Il peut aller jusqu’au sentiment de harcèlement moral (6 et 14 %) et conduit à des arrêts maladie (1 et 6 %).
Au total, sur une échelle de 1 à 10, un tiers des cadres notent leur stress à 8 (21 %), 9 (10 %) ou 10 (2 %) et seulement 31 % à 5 ou moins. La note moyenne est de 6,2.
Un des premiers indicateurs du stress est une réponse physiologique. Il s’agit du ralentissement de la respiration, d’une difficulté à respirer. Quand une personne est en situation de stress, une des premières choses à faire est de lui réapprendre à respirer, pour lui permettre de mettre à nouveau de la conscience dans sa respiration. C’est pourquoi, très souvent, on accompagne les personnes stressées dans la capacité d’être à nouveau dans une conscience de leur respiration où elles pourront être actrice du fait de respirer alors qu’en situation de stress, elles ne sont même plus actrice de leur respiration. Et ce petit détail fait qu’elles redeviennent actrices de leur réalité physiologique et de ce fait, de leur extrême. Un stress qui peut nous entraîner jusqu’à ne plus dormir, ne plus avoir envie de manger. C’est jusqu’à ce point un indicateur de déséquilibre et non pas de rupture mais si, à un moment donné, une personne se retrouve dans une situation où elle ne peut plus avoir un engagement, si elle se désengage de toute action, de toute possibilité d’action mentale, comportementale, elle va parvenir à un point où elle ne pourra plus envisager de futur.
C’est alors qu’elle va rentrer dans un espace de rupture, un espace de dépression qui, lui, sera fondé sur l’incapacité de la personne à construire un futur possible. C’est la phase suivante si le stress n’a pas été géré. La personne ne va plus pouvoir concevoir des actions possibles, des comportements possibles, des aptitudes possibles mentales ou d’actions dans l’environnement, et à ce moment-là, le retrait fait qu’elle sombre dans un état de dépression. Parce qu’il y a une pression telle de l’environnement que la seule solution est d’entrer en dépression pour ne pas subir la pression.
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