Par ADP Margot Bouisson, Assistante Communication & Ecosystème
Génération Y : de quoi parle-t-on ?
Depuis quelques années déjà, le concept de « Génération Y » déclenche bien des débats, agite la toile, donne lieu à de nombreuses conférences et surtout à des divergences de points de vue. L’expression « génération Y » a été inventée en 1993 par le magazine américain Ad Age. En France, c’est Benjamin Chaminade, spécialiste international en gestion des talents, qui a initié ce concept de Génération Y, issu du marketing et qui a été adapté aux Ressources Humaines. Après les Baby-boomers, nés entre les années 1945 et 1960, la génération X née entre les années 1960 et 1980, la génération Y regroupe les personnes nées après les années 1980. Ces jeunes ont évolué dans un contexte nettement différent de celui des générations précédentes. La révolution technologique et l’arrivée des nouveaux outils de communication leur ont permis d’acquérir une maitrise quasiment intuitive des outils informatiques et une ouverture sur le monde avec un accès permanent et instantané à l’information. Ils ont évolué avec la mondialisation et dans une société de services où l’échange prime le produit. Un autre fait marquant dans leur histoire : la crise. Ils ont, en effet, subis de plein fouet cette crise économique. Ils ont vu leurs parents se faire licencier, et ce malgré une fidélité et une exemplarité envers leur entreprise, être au chômage en conséquence à un marché de l’emploi de plus en plus compétitif. De nombreux facteurs qui ont encouragé ces jeunes à devenir moins attachés à l’entreprise et à prendre plus de distance vis-à-vis de leur employeur.
Ces personnes présentent donc une forte homogénéité en matière de valeurs, de culture, d’histoire ou encore en termes d’attentes professionnelles. Autant de critères qui leurs ont valu d’être catégorisés sous un seul terme : la Génération Y (avec le Y prononcé à l’anglo-saxonne : « Why »). Le principal est de garder en tête que derrière le terme génération certes, il y a un ensemble d’individus avec des caractéristiques communes, mais que chaque individu conserve des spécificités qui lui sont propres.
Pourquoi cette génération est-elle mise au centre de toutes les attentions ?
En France, la génération Y, aussi appelée « Yers », regroupe plus de 13 millions de personnes, ce qui représente 21% de la population active. D’ici à 5 ans, elle représentera quasiment la moitié de la population active, sans compter sur la génération Z, qui viendra à son tour bouger les lignes et les codes des entreprises. En effet, aujourd’hui, nous commençons également à parler de la génération Z, qui regroupe l’ensemble des jeunes nés après les années 2000, et qui n’ont pas encore intégré le milieu professionnel. Les entreprises doivent alors se tenir prêtes à accueillir cette nouvelle génération, nettement différentes des générations précédentes dans leur rapport au travail, leurs attentes et leurs motivations.
Demain, ces « Digital Native », comme les Américains les appellent, seront aux commandes de nos entreprises. Et c’est pourquoi les entreprises, les employeurs, les managers et les directions des Ressources Humaines leur portent un intérêt tout particulier. Que l’on soit d’accord ou non avec le concept de génération Y, ce qui est sûr c’est que cette génération est celle de demain ! De ce fait, il est fondamental, tout particulièrement pour les départements des Ressources Humaines des entreprises, de connaitre ces nouveaux codes, de comprendre cette nouvelle façon de travailler et surtout de savoir en tirer profit (fidélisation des nouveaux talents, motivation et recrutement).
En quoi la génération Y est-elle si différente des générations précédentes ?
La première grande différence réside dans l’accès à l’information. Les « Digital Natives » sont nés avec les révolutions technologiques et connaissent sur le bout des doigts leurs utilisations, pour la grande majorité (ne faisons pas de généralité !). Génération surinformée et hyper-connectée, la génération « Why » est en constante quête de sens : connaitre le pourquoi et le comment. Quel est le but de mon travail ? Quelle est l’utilité de ma mission ? Les managers ne peuvent plus se contenter de donner des ordres et des directives, ils se doivent d’être transparents.
Plutôt pessimistes sur leur avenir, les « Yers » évoluent et vont évoluer dans un contexte économique difficile. Les diplômes ne suffisent plus face à un marché de l’emploi toujours plus concurrentiel et instable, et ils le savent. Cependant, dite plus adaptable que les générations précédentes, la génération Y a appris à faire des compromis (salaires et niveaux de poste revus à la baisse) en réponse à ce monde du travail en perpétuel mouvement.
Contrairement aux Baby-boomers qui prônent l’obéissance, le respect de la hiérarchie et la rigueur, à la génération X qui est à la recherche du succès grâce aux challenges, au développement des compétences et à l’atteinte des objectifs, la génération Y est à la recherche d’un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle et privilégie les rapports horizontaux aux rapports verticaux. Les « Yers » viennent bousculer les codes traditionnels de l’entreprise, bousculant en même temps l’organisation du travail et le style de management qui jusqu’à présent avaient été mis en place par leurs aînés.
Qu’est-ce qu’attend la génération Y de son entreprise ?
Nombreux sont ceux qui résument cette génération uniquement à leurs dates de naissance. Pourtant il est pertinent, pour mieux les manager, de creuser plus profond pour avoir une vision claire des caractéristiques communes que ces jeunes ont vis-à-vis du monde du travail.
Environnement de travail
Premièrement, les Baby-boomers et la génération X misaient – et misent avant tout – sur leur travail pour être épanouis. Ce que recherchaient ces personnes dans leurs entreprises, c’étaient des résultats et un statut. Aujourd’hui, ce que recherche la jeune génération, c’est avant tout un environnement moderne, attrayant, avec une ambiance de travail détendue. Prenons l’exemple de la société Google qui a été classée en 2013« entreprise la plus attractive auprès des jeunes étudiants européens des écoles de commerce, de management ou encore d’ingénieurs », selon l’enquête Universum 2012. Et ce n’est pas un hasard : cantine gratuite, salles de sport, garderie pour les animaux de compagnie, de nombreux espaces dédiés à la détente…
Équilibre entre vie privée et vie professionnelle
Les « Yers » mettent en avant l’équilibre entre leur vie personnelle et leur vie professionnelle. Leur souhait est de pouvoir jongler entre ces deux mondes en estompant leurs limites (lire des e mails perso au boulot, répondre à un appel professionnel le samedi…). Leur rapport avec l’entreprise est basé sur des relations « donnant-donnant ». Attention, cela ne veut pas dire travailler moins, mais travailler autrement !
Mobilité et flexibilité
L’entreprise d’aujourd’hui et ses managers doivent comprendre que la flexibilité est primordiale dans cette génération. Peu importe l’heure d’arrivée et l’heure de départ du collaborateur, ce qui prime, c’est avant tout le résultat obtenu et leur performance. La mobilité est aussi très à la mode chez les jeunes. Que ce soit en termes de mobilité au sein de l’entreprise, de mobilité entre différentes entreprises ou encore de mobilité à l’international, les jeunes générations ont soif de changement. Les « Yers » ont tendance à être plus volatiles et moins fidèles à leur entreprise, à la différence des générations précédentes qui souvent passaient une bonne partie de leur carrière dans la même entreprise : ils souhaitent faire leurs armes dans le plus d’entreprises possible en multipliant les expériences. Que cela plaise ou non, ce qui est sûr, c’est que ces jeunes ont la bougeotte…
Reconnaissance et feedback
A la recherche d’un management de proximité, voire personnalisé, les « Yers » ont besoin de reconnaissance. C’est un point essentiel en termes de motivation et d’implication de ces jeunes dans leur travail. Depuis leur enfance, ils ont été habitués à vouloir tout, tout de suite, se comportant ainsi comme des « enfants rois ». En entreprise, ils ont alors besoin pour avancer que leur travail soit reconnu, d’être félicité lorsque c’est mérité, mais également d’être remis à l’ordre lorsque cela est nécessaire. Il est important de mettre en place avec eux des objectifs rapides (génération zapping) et de les encadrer en leur expliquant les règles du jeu dès le début.
RSE et management de qualité
La notion d’entreprise responsable et citoyenne est tout autant importante aux yeux des jeunes générations, puisqu’elles sont sensibilisées depuis l’enfance aux enjeux environnementaux et mondiaux. Les démarches de RSE et le management de qualité font d’ailleurs partie des programmes de la plupart des écoles de commerce et de management. Une plus large ouverture sur le monde et l’accès instantané aux informations font de ces jeunes des « citoyens du monde », désireux de rendre le monde meilleur. Il est alors très significatif pour eux qu’une entreprise soit engagée dans une démarche de RSE et de développement durable.
Innovation
Les nouvelles technologies et les nouveaux outils de communication font partie intégrante de la vie des jeunes. Smartphones, tablettes, internet, réseaux sociaux, il ne se passe pas un jour sans qu’ils soient connectés. Arrivant sur le marché du travail, ils s’attendent alors à ce que les entreprises d’aujourd’hui soient à la pointe de la technologie. Selon l’étude Deloitte « Millenial Survey 2014 », 78% des jeunes actifs interrogés considèrent l’innovation comme étant un critère important lors du choix de l’entreprise. Ces « digitales natives » vont vite, comprennent vite et souhaitent que l’entreprise suive cette cadence.
La génération Y et les ressources humaines
Cette génération pose donc de nombreux défis pour les entreprises, et plus particulièrement pour la fonction RH : Comment attirer ces nouveaux talents ? Comment les fidéliser ?
Par définition, la génération Y est une génération de Zappeurs, qui n’hésitera pas à changer d’entreprise si l’opportunité se présente. Les Directions des Ressources Humaines ont alors tout intérêt à se pencher sur ces questions car, rappelons-le, cette génération représentera plus de 40% de la population active d’ici 2015.
Le développement de parcours d’intégration poussés prend alors tout son sens avec cette génération, qui est en quête de cohésion et de conditions de travail agréables. La première impression de l’entreprise est, en effet, très importante chez ces jeunes. L’essentiel est de pouvoir créer une véritable synergie intergénérationnelle et de stopper les clivages. Pour ce faire, des programmes de tutorat peuvent être mis en place pour une meilleure transmission des savoirs et cohabitation professionnelle.
Concernant le recrutement, les voies traditionnelles ne suffisent plus. Les jeunes de la génération Y recherchent directement les annonces de recrutement via le WEB et sur les réseaux sociaux : annonces plus visibles, interactives et qui élèvent l’entreprise au rang d’entreprise moderne et dynamique auprès de ces jeunes. Lors du processus de recrutement, les jeunes fraichement diplômés sont à la recherche d’échanges et souhaitent se sentir écoutés et respectés. Fini l’époque de l’entretien de recrutement avec un recruteur austère souhaitant piéger le candidat, place au dialogue et à l’échange !
Les jeunes de la génération Y souhaitent pouvoir évoluer vite et acquérir le plus de compétences possible. Pour ce faire, la formation est un levier essentiel pour eux. Au-delà des formations, la mise en place de plans de carrière ainsi que des entretiens d’évaluation fréquents sont également appréciés par cette génération.
Leur désir de flexibilité se traduit, dans le management des Ressources Humaines, par la mise en place d’horaires de travail flexibles, par exemple, ou encore par la mise en place d’un programme de télétravail. Ce travail à distance est devenu possible grâce à l’avancée des nouvelles technologies et permet ainsi aux jeunes collaborateurs d’obtenir un équilibre entre leur vie privée et vie professionnelle, d’engendrer moins de stress causé par le transport et moins de fatigue. Du côté employeur, il y a également de nombreux avantages : réduction de l’absentéisme au travail, augmentation de la productivité du collaborateur en télétravail due au dépassement des heures de travail gagnées sur le temps de transport…
Comme vous l’aurez compris, il est fondamental de ne pas catégoriser les membres de la génération Y en s’arrêtant uniquement sur leurs dates de naissance. Bien évidemment, ces dernières nous donnent des indications concernant les évolutions qu’ils ont connues, le monde dans lequel ils ont évolué,…néanmoins cela va bien au-delà. L’expression « Culture Y », allant plus loin que la seule détermination par la classe d’âge, serait-elle alors plus appropriée que celle de « Génération Y » ?
Il ne faut en aucun cas oublier que malgré les nombreuses caractéristiques communes citées dans cet article et que l’on peut trouver dans bien d’autres textes, cette génération reste un ensemble d’individus hétérogène, en raison de leurs différences d’éducation, de vie de famille ou de leur situation géographique par exemple.
http://business.lesechos.fr/directions-ressources-humaines/partenaire/partenaire-115-generation-y-une-question-de-culture-bien-plus-que-de-classe-d-age-63423.php
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