Les femmes sont encore bien peu présentes dans les instances dirigeants. Pour autant, leur présence, si elle se renforçait pourrait être un vecteur de changement et d’efficacité. Voici un extrait de mon livre pour un premier état des lieux
Dans les sociétés développées, les femmes sont le véhicule du progrès et de la modernité –non seulement celui de la survie de l’espèce, mais de l’espoir, en grande partie parce qu’elles désirent plus encore le changement que leurs homologues masculins », écrivait Dominique Moïsi,[1], dans son ouvrage La Géopolitique de l’émotion[2]. Quant au magazine The Economist [3] (janvier 2010), dans son dossier consacré aux pouvoir des femmes, il qualifiait la montée des femmes au pouvoir comme l’un des plus beaux défis à relever dans les prochaines décennies. Pour autant, les femmes restent encore très peu nombreuses dans les instances dirigeantes et la France est de ce point de vue à la traîne.Leur place dans l’entreprise
– Bien peu de femmes accèdent à des postes à haute responsabilité. Elles seraient 2% des femmes dans le top management aux USA, 5 % en GB (The Economist[4]). Cette rareté limite de facto leur influence. Pourtant, selon l’étude de Mc Kinsey[5], les filles arrivent à peu près à 50/50 dans les grandes écoles ; sauf dans les filières scientifiques où elles représentent à peine 30 % des effectifs. Ce déficit restreint dès le départ les possibilités de voir émerger une femme dirigeante dans les domaines techniques et dans l’industrie qui embauche beaucoup d’ingénieurs. Par contre, les femmes sont très largement majoritaires dans les études de marketing, de publicité, de communication et de santé. Mais, alors qu’elles représentent 55 % des diplômées des universités en Europe, elles travaillent moins souvent, sont beaucoup moins bien payées à poste égal (environ 15 % de moins que les hommes) et seulement 11 % d’entre elles en moyenne sont membres des instances dirigeantes des entreprises cotées (plus de 32 % en Norvège comparé à 8 % en France). Si les entreprises embauchent généralement autant d’hommes que de femmes en début de carrière, elles se font plus rares au sommet de la pyramide. Globalement entre 35 et 40/45 ans, seuls 25 % obtiennent des responsabilités. Aux postes de direction, elles sont au mieux une poignée, au pire elles sont inexistantes.
Pour mesurer l’excellence organisationnelle, Mc Kinsey s’appuie sur neuf critères: leadership, vision, environnement de travail et valeurs, responsabilité, coordination et contrôle, compétences, motivation, innovation, et ouverture sur l’extérieur. Il ressort que les performances des entreprises sont supérieures à la moyenne quand des femmes sont dans les instances dirigeantes, et qu’à partir du moment où elles sont au moins trois sur une moyenne de 10 personnes, l’effet s’amplifie. Un membre du directoire d’un groupe bancaire remarque ainsi : « lorsqu’il y a des femmes dans un comité de direction, la nature des échanges n’est plus la même. Mais il en faut plusieurs, une ne suffit pas. » « Leur présence font que les hommes vont mieux se tenir, surveiller leur langage et leurs réflexions, contrôler leur agressivité», confie d’ailleurs une dirigeante. L’étude montre également que, pour leur présence ait un impact très positif sur la stratégie de l’entreprise, il faut qu’elles soient au minimum trois dans un conseil d’administration (soit environ un tiers à un cinquième du nombre total d’administrateurs).
De plus, la mixité au niveau des instances dirigeantes est aussi bénéfique à l’image de l’entreprise et constitue un facteur de convergence entre l’entreprise, ses employés, ses actionnaires et ses clients, constate le cabinet d’autant qu’en Europe, environ 70 % des décisions d’achat des foyers seraient prises par les femmes. Une donnée qui n’avait pas échappé à Gilles Pélisson[6], quand il était encore patron de Bouygues Telecom, la moitié de ses clients d’alors étant des femmes.
Pour Ingrid Bianchi[7], qui fait de la diversité son cheval de bataille, cette évolution contribue, de surcroît, à casser le clonage, très répandu dans certaines grandes entreprises françaises où les dirigeants sortent de la même grande école, parfois du même corps ; ce qui implique une propension à penser de la même manière et ne favorise pas toujours l’efficacité, la diversité et la créativité.
On peut espérer que ce mouvement de promotion des femmes va se poursuivre et s’amplifier au regard de leur nombre au niveau des études supérieures. Elles sont de plus en plus éduquées et font des études à un haut niveau, même dans les pays du Moyen-Orient.
[1] Conseiller spécial de l’IFRI (Institut français de relations internationales – Professeur de sciences politiques à l’Université de Harvard et duCollège d’Europe
[2] Flammarion – Novembre 2008
[3] January 2nd-8th 2010 « We did it » – What happens when women are over half the workforce
[4] January 2nd-8th 2010 « We did it » – What happens when women are over half the workforce
[5] Etude de McKinsey & Compagny, Inc, publiée par European PWN, présentée au Women’s Forum -« Women Matter – La mixité, levier de performance de l’entreprise » – 2007.
[6] Ancien directeur général d’Accor
[7] Directrice générale du cabinet Diversity Source Manager
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