Les années passent et force est de constater qu’une statistique demeure sur le marché français, indépendamment de la conjoncture : seuls environ 25 % des postes de cadres supérieurs sont confiés à des cabinets de conseil en recrutement.
Il est très intéressant de comparer ce chiffre à celui existant dans les pays anglo-saxons, où, notamment en Grande-Bretagne, la part de marché confiée aux cabinets est diamétralement opposée avec un pourcentage d’environ 75 %.
En France donc, et plus qu’ailleurs, il est fondamental pour les cadres supérieurs et dirigeants d’aller au contact de ce marché « caché », vivier riche d’opportunités. Il apparaît vital de ne pas se contenter de suivre les annonces et d’attendre les appels de cabinets.
Face à cet enjeu, les comportements des cadres supérieurs en France et à l’étranger divergent. Si les anglo-saxons sont férus de networking, leurs homologues français se montrent encore quelque peu frileux lorsqu’il s’agit de se lancer dans le réseautage. Même si, et c’est une excellente nouvelle, les comportements en la matière se révèlent évolutifs.
Pour avoir pu les côtoyer en Amérique du Nord, j’ai eu l’occasion d’observer et de comprendre comment ces cadres supérieurs « fonctionnent » en matière d’activation de réseau. En poste, ils ne laissent pas passer une semaine sans assister à un événement de type conférence en fin de journée, considérant qu’il y va d’une saine gestion proactive de leur réseau.
« Les cadres anglo-saxons sont passés maîtres dans l’art de l’elevator pitch . »
Chaque semaine, ils se font forts de rencontrer un maximum de nouveaux interlocuteurs en peu de temps, passés maîtres dans l’art de l’elevator pitch, véritable présentation percutante et contractée de leurs savoir-faire et de leurs projets. Pour autant, et c’est là le secret, l’idée n’est pas pour eux de se positionner en demandeur, mais bien au contraire de proposer des solutions, se plaçant dans une logique de découverte et de partenariat. Au-delà des rencontres, et en aval de celles-ci, ils développent un véritable suivi (emails, potentiellement rendez-vous et déjeuners) de cette toile, la qualifiant ainsi au fur et à mesure.
Jouant dans ce registre régulièrement et assidûment, ils se retrouvent donc, le moment venu, en position à la fois visible et légitime de solliciter les uns ou les autres au sein d’un réseau diversifié et efficace.
Une fois ce constat posé, faut-il impérativement dupliquer le modèle anglo-saxon ?
Certainement pas, tant ses modalités de fonctionnement dans ces critères de volume et d’immédiateté ne correspondent pas à un mode de fonctionnement culturel différent dans les pays latins.
Il est en revanche extrêmement intéressant de s’en inspirer et d’en retirer quelques bonnes pratiques essentielles au bon fonctionnement de cette stratégie.
La première des recommandations est de se poser pour démystifier ce concept de réseau et de s’attacher à le définir de façon « décomplexée ».
La très bonne nouvelle est que ce fameux réseau, en amont de toute participation à des événements dédiés, existe et qu’il suffit de le qualifier, par cercles concentriques. Ainsi, contrairement à ce que j’ai pu entendre, le réseau ce n’est pas uniquement le faisceau des éventuelles références professionnelles, mais bien l’ensemble des membres de la famille, les amis, les associations d’anciens d’école ou d’entreprises précédentes, les clients, les fournisseurs, les commissaires aux comptes, les banquiers, etc.
L’inquiétude pour certains consiste à « passer au révélateur » de ce réseau incluant des relations de forte proximité. Et pourtant, un ami qui ne répond pas favorablement à une sollicitation de type professionnel, n’en demeure pas moins un ami, il ne souhaite juste probablement pas mélanger les genres et cela est respectable ; un autre ami acceptera. La résultante est la qualification de ses contacts et du coup une vision plus efficace de son propre environnement.
Ainsi, chacun peut se prévaloir d’un véritable réseau, avant « d’aller faire du réseau » et d’assister à ses premières conférences.
Dans un second temps, je ne saurais trop conseiller d’investir du temps sur cette activité avant d’en avoir besoin !
On entend beaucoup dire que chercher un job est un job à temps plein ; je suis largement tenté de répondre oui, surtout si on n’a pas anticipé cette période de recherche. Celle-ci est d’autant plus mal vécue qu’elle dure, ce qui est bien légitime. La multiplication des moyens de recherches en temps réel et donc l’entretien du réseau (versus l’activation from scratch de ce dernier) confèrent à la recherche une densité et un rythme plus agréables à vivre.
Il faut donc dans les faits s’astreindre à se dégager du temps disponible et sortir de la spirale du présentéisme très en vogue, notamment à Paris. On peut imaginer que les cadres supérieurs et dirigeants, attendus sur des résultats plus que sur des horaires, aient la capacité à optimiser leur temps.
Un troisième point concerne l’efficacité de la recherche, d’autant plus porteuse que les cadres auront eu un réflexe d’investissement en amont.
Cela consiste dans leur exercice de networking à aider, proposer des solutions et à se positionner en facilitateur. De fait, et selon les lois de l’offre et de la demande, si l’ensemble de l’assistance vient et participe aux mêmes réunions avec le même but affiché, il y a un vrai risque de stérilité des échanges, conséquence logique d’un profond déséquilibre des forces en présence.
Selon le vieil adage, il faut savoir donner d’abord pour mieux recevoir ensuite. Cela permet de se faire connaitre de plus d’interlocuteurs, et d’un point de vue qualitatif, cela soigne l’image et favorise d’autant plus l’ouverture potentielle de nouvelles portes.
« Disponibilité, échange d’informations et capacité à se rendre service donnent à ces relations professionnelles toute la dimension humaine nécessaire. »
Pour finir, ces bonnes pratiques de réseautage qui permettent d’aller à la rencontre d’un marché « caché » loin d’être négligeable peuvent, et à mon avis doivent, se dupliquer dans la relation à avoir entre candidats et consultants en cabinet de conseil en recrutement. Disponibilité, échange d’informations et capacité à se rendre service donnent à ces relations professionnelles toute la dimension humaine nécessaire et permettent de ne pas se cantonner à une relation utilitaire et appauvrie.
Rien ne remplace la relation « intuitu personæ » au long cours, faite de confiance, d’écoute et de bienveillance.
- Publié le 28 juin 2017
- Sélectionné dans : Carrière & Leadership
Laisser un commentaire